La tribune des apprenants

Persan (farsi / dari)  فارسی / دری

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Peul de Guinée (pular) 𞤆𞤵𞤤𞤢𞤪

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Peul du Mali (fulfulde) 𞤊𞤵𞤤𞤬𞤵𞤤𞤣𞤫

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Bonjour chers élus,
En tant qu’apprenants du français, nous sommes des personnes déracinées. Ici en France, nous avons trouvé une nouvelle terre pour nous réinstaller. Pour notre intégration, pour notre (ré)insertion professionnelle et sociale, l’apprentissage de la langue est indispensable.

Aujourd’hui, le « projet de loi pour Contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » nous incite à nous exprimer et à donner notre avis sur les conditions actuelles de l’apprentissage du français.

Nous souhaitons attirer votre attention sur les éléments suivants :

  • Tous les apprenants n’ont pas accès aux cours de français :
  • L’offre de formation ne correspond pas à la demande.

    Il y a un délai important pour une première entrée en formation et entre chaque niveau linguistique.

    Les plus petites villes ne proposent pas forcément de cours. Cela nous oblige parfois à déménager ou à nous déplacer sur de grandes distances.

  • Nos conditions d’apprentissage ne sont pas bonnes :
  • La composition des groupes de niveaux n’est pas toujours pertinente. Souvent les niveaux sont mélangés.

    Le nombre d’apprenants par groupe est souvent élevé. C’est difficile d’apprendre dans des groupes de 15 personnes ou plus.

  • Les formations ne nous correspondent pas forcément :
  • Nos situations sont très différentes.

    Certains apprenants sont allés à l’université dans leur pays et d’autres apprenants ne sont jamais allés à l’école. Nous n’avons pas les mêmes scolarités, les mêmes besoins linguistiques et la même disponibilité. Les formations linguistiques assurées par l’OFII ne peuvent pas suffire, et tout le monde ne dispose pas de formations adaptées.

    Penser les formations seulement en termes de niveaux ne suffit pas !

    Il faut une offre de formation diversifiée : des formations intensives de 30h par semaine, des formations de 6h par semaine, des formations en langue maternelle, sur objectifs spécialisés (oral ou écrit, scolarité, monde professionnel…), des ateliers de conversation…

  • Les possibilités de mode de garde pour les enfants en bas-âge sont limitées :
  • Les parents apprenants sont souvent contraints de suspendre leur apprentissage en attendant d’avoir une place en crèche.

  • Nos diplômes professionnels ne sont pas reconnus :
  • Avec quelle motivation apprendre le français, en sachant que nous ne pourrons jamais exercer le métier pour lequel nous avons étudié ?

  • Les conditions de travail des formateurs sont souvent difficiles :
  • Les conditions de travail des formateurs vont se répercuter sur les apprenants.

    Pour bien nous accompagner, les moyens doivent donc être à hauteur des objectifs et des besoins de chacun. La charge administrative des formateurs est importante.

    Ils n’ont pas toujours le temps pour la préparation des cours et le suivi pédagogique des apprenants.

    Qui a envie de devenir formateur dans ces conditions ?

  • Les bénévoles sont trop souvent isolés :
  • Une part trop importante de l’accueil et de l’apprentissage repose sur les épaules des bénévoles, qui ne sont pas toujours formés à cela. Une formation des bénévoles devrait être proposée systématiquement.

    Nous apprécions leur travail et leur engagement, mais il doit être complémentaire à une formation dispensée par un professionnel.

    Les bénévoles peuvent aussi être responsables d’autres actions, et pas uniquement des cours de français : sorties, actions culturelles ou sportives… Cela permettrait de répondre à d’autres attentes, d’autres manières d’apprendre.

Nous sommes très motivés pour apprendre le français, pour reconstruire notre vie ici et participer à la société. Malheureusement, certains d’entre nous se découragent, car nous rencontrons beaucoup d’obstacles pendant notre apprentissage du français.

En tant qu’apprenant de français, nous revendiquons l’accès :

  • à des formations en langue française dispensées par des professionnels, sur l’ensemble du territoire français,
  • à une offre de formation diversifiée qui réponde à la diversité de nos besoins,
  • à un accès prioritaire aux crèches, au même titre que les travailleurs ou les stagiaires de la formation professionnelle
  • à la reconnaissance et la valorisation de nos diplômes.
 

Cette tribune a été discutée et rédigée par des personnes qui apprennent le français en France, et qui participent à une recherche-action du collectif Le Français Pour tous. Cette tribune a été initiée par Gülten Boyaci (Centre social et culturel l’Albatros, Lingolsheim), qui a ensuite été rejoint par Salah Issa (association Coraplis, Niort) et Radwan Idriss (association Echange Culturel et Solidaire Franco-Soudanais, Tours). Tous trois ont nourri cette tribune d’expériences et d’échanges auprès d’apprenants de leurs réseaux.

En signant, je déclare partager le point de vue exprimé par cette tribune et la soutenir.