Thématique 1 : Quelles limites aux politiques linguistiques d’immigration ?

6 – Les niveaux (A1, A2, B1…) et les diplômes (DELF, …)

Légende : (C) coupé ; (X) mot inintelligible ; (XXX) groupe de mots inintelligibles ; précisions en italique.

Les extraits

Extrait 1 : Et après on reprend à partir du A1 ? On répète toujours la même chose

Emel : (…) mais niveau B2 c’est essentiel. Essentiel pour trouver un travail pour continuer à cette euh son étude, mais comment nous on doit faire ? Comment nous on doit faire ? Voilà. On vient jusqu’à A2 et après on reprend euh, à partir de A1 ? On répète toujours la même chose, on arrive pas à avancer, et si on connait pas tro euh, la langue, euh l’apprentissage des langues, vous êtes coincé. Vous êtes coincé. Moi euh, je travaille pas euh, mais pour ma vie, pour mon confort, euh je trouve j’ai avancé, je m’exprime, facilement, euh mais, comme je suis professeur de Turque, je connais un peu euh, un peu la manière, mais tout le monde connaît pas ça, voilà. C’est pour ça je trouve très important les formateurs les formatrices euh, soient volontaires, et soient, très forts, et actuels, toujours actuels, voilà.

(Entretien réalisé à Lingolsheim, 10/03/2022, extrait 15, 1’18’15 à 1’19’27)

Précisions :

Lingolsheim, centre social et culturel de l’Albatros

Contexte :

  • Lingolsheim, centre social et culturel de l’Albatros, entretiens organisés par Mia Depoutot et Eric Mercier. Mia travaille à l’Albatros comme coordinatrice et connait bien les participant.e.s. Eric rencontre les participants pour la première fois.

  • Atelier de 2 heures regroupant 4 participant.e.s et 2 animateur.rice.s (Mia et Eric) dans une grande salle. Petit atelier organisé autour d’une table ronde. Présence de 2 enfants en bas-âge.

  • L’audio est peu audible par moment (bruits de chaises/voix d’enfants).

Participante :

  • Emel : Emel a la quarantaine. Elle est maman, originaire de Turquie et anciennement professeure de turc.

Extrait 2 : Les changements de formateurs : des opinions contrastées

Christine : (…) le fait de changer de formateurs tous les jours c’est euh, c’est très compliqué. Et j’voulais savoir ce que toi t’en pensais. (…)

Sharon : La, la bonne chose c’est que, les les formateurs quand on connait on a l’habitude de, de partager des choses comme une famille, et là, avec un nouvel formateur des fois on commence à vouvoyer. Mais juste au boût de 15 minutes on est à l’aise pour moi ça ne, ça ne pose un,  pas de, question. Pas de souci pour moi. Parce que la dernière fois que j’étais là, c’était, on était jeudi là, j’ai rencontré une dame en haut là, je sais plus qui

Christine : Sylvie.

Sharon : Sylvie., c’était Sylvie, et j’ai jamais été dans sa classe et, avec elle j’étais très à l’aise et, (…) ça s’est bien passé en fait. Donc euh ça change un peu pour moi.

Ariana : Mais, moi je suppose aussi, parce que au début comme moi, je pensais que c’était dur, de changer, mais après, eux ils vont savoir après quand moi je les vois aujourd’hui, c’est mieux de changer, parce que tu peux adap tu peut t’adapter, avec tout le monde. Euh, chacun il explique dans sa manière, tu vas apprendre euh, différentes manières. Du coup moi je trouve c’est bien. Mais au début, comme moi je trouvais c’était dur, chacun ça peut être dur, mais après ça va être une (X). Moi je suis comme ça.

Kamal : Oui, mais à mon avis, c’est le question de niveau. Par exemple pour moi c’est souvent la même chose. C’est la conjugaison, grammaire, c’est toujours la même chose, pour moi.

Ariana : Mais si, après je ne sais pas hein, mais si, le formateur, la formatrice, il voit que toi, dans les conjugaisons, t’es, t’as passé, t’as tout appris, toi tu peux lui dire Christine exemple, là j’ai plus besoin, et après c’est Christine qui va le changer

Sharon : Mais par contre quand j’étais avec Sophie le mardi là, (X) on était trois, on on avait trois différents niveaux, et puis on était dans la même classe, et, c’était bien, ils te donnent aa, si toi tu as un niveau plus haut ils te donnent quelque chose plus haut, niveau B1, ils te donnent, oui, donc euh,

Christine : Tu veux dire c’est un échange euh,

Ariana : Pour moi c’est bien de changer en fait.

Sharon : Oui c’est bien,

(Entretien à l’AAPIQ, Rochefort, 02/02/2022, extrait 8, 21’07 à 24’43)

Précisions :

Association AAPIQ

Contexte :

  • Entretien réalisé par Christine Gay et Mickaël Billandeau (alternant éducateur), premier test d’entretien à Rochefort auprès de 5 apprenant.e.s.

  • L’entretien s’est déroulé dans un quartier prioritaire de Rochefort. Nous nous sommes réunis dans une des salles dédiées à l’apprentissage du français où ils ont l’habitude de venir. L’aapiq est impliquée dans l’association Coraplis depuis sa création en 2010.

    Le centre social AAPIQ est, depuis son origine, impliqué dans l’apprentissage du français aux étrangers par nécessité des habitants des quartiers dans le suivis de la scolarioté de leurs enfants, les besoins médicaux ou sociaux….

Participant.e.s :

  • Alexandra  (Roumanie)

  • Ariana  (Albanie)

  • Kamal (Soudan)

  • Sharon (Niger)

  • Suleman (Afghanistan)

Extrait 3 : J’ai besoin de travailler pour progresser en français

(L’exigence de diplômes empêchent Hamza de travailler. Hamza rejoue ici sa façon d’expliquer à chaque interlocuteur social son besoin inverse, de travailler d’abord, pour pouvoir se débloquer en français) 

Hamza : « Excusez-moi Madame, je ne parle pas bien français, mais je comprends bien le français  (…) mais maintenant, je cherche travail. C’est pour moi première chose, travail. Parce que je suis avec le RSA, le minimum, très difficile. C’est la 1e chose. Après, après le travail, euh, je vais prendre un cours spécialiste, (…) B1, je pense je vais passer. Je pense. Mais j’ai besoin maintenant, le minimum, 2 ans, travail, après, je vais essayer pour le B1. Mais 1e chose, maintenant j’ai besoin travail. Qu’est-ce que je fais ? (…) »

(Entretien à Tours,  Mars 2022, extrait 12, 1’23’43 à 1’25’07)

Précisions :

Contexte :

  • Entretien réalisé chez Eric autour d’un apéritif, avec Hamza, Fadi (frères, kurdes de Syrie), Bassem et Samir (Père et fils, originaires de Syrie)

  • L’enquêteur (Eric) a été le formateur de Hamza et Bassem. Hamza lors d’une formation professionnalisante de niveau A1 (3 mois avant l’entretien), et Bassem lors des formations OFII, environ 4 ans avant l’entretien. L’enquêteur rencontre Fadi et Samir pour la première fois.

Participant :

  • Hamza, la quarantaine, est Kurde de Syrie. Il a fait l’expérience de l’apprentissage, oral mais aussi écrit, de nombreuses langues étrangères par le passé. Il en a appris certaines à l’école (l’arabe) mais aussi dans le cadre de son travail (urdu) ou bien de migrations (turque).

Extrait 4 (formatrice) : Les niveaux en langue comme moyen d’exclure des personnes de la régularisation

Stéphanie : (Les liens entre niveau en langue et l’obtention d’un titre de séjour) Moi j’pense que c’est un moyen d’exclure des personnes de la régularisation. Bon, c’est normal qu’on demande que les gens euh, qu’on favorise l’intégration etc., mais là on on on sent que c’est un moyen pour exclure certaines personnes. On voit bien que euh bon euh,  que le A2 le Delf A2 pour avoir la carte de 10 ans, euh bon ça touche des personnes euh qui oralement s’en sortent hein, bien, mais qui euh, mais qui à l’écrit euh n’ont pas les compétences euh de production écrite et, de compréhension écrite, enfin surtout de production écrite, euh, et le Delf B1 pour la naturalisation, c’est c’est pareil, parce que il y a des personnes qui sont depuis très très longtemps en France, qui demandent à être naturalisées, qui s’expriment bien oralement mais, qui n’ont pas les compétences euh de compréhens.. enfin surtout de production écrite nécessaire pour obtenir le Delf. J’pense que c’est quand même un outil d’exclusion. J’le ressens comme ça. J’le sens comme ça.

(…) Alors on a des personnes qui viennent s’inscrire dans nos groupes pour obtenir la carte euh, de résident de 10 ans, et aussi pour obtenir la naturalisation, mais ils ont d’énormes difficultés, là j’ai moi même un Monsieur Portugais qui est depuis 30 ans en France, mais au niveau de l’écrit il est au niveau A1, donc pour aller de A1 à B1 c’est extrêmement difficile.

(Entretien avec Stéphanie, Paris, le 17/03/2022, extrait 8, 14’19 à 17’04)

Précisions :

Contexte :

  • Entretien réalisé par Fatma Zohra, avec la présence de Zenaida (amie de Fatma-Zohra et participante à la recherche-action). L’entretien est réalisé au domicile de Fatma Zohra (Paris). Fatma Zohra et Stéphanie sont amies. C’est le premier entretien réalisé par Fatma-Zohra.

  • Fatma Zohra a connu Stéphanie il y a 10 ans lors d’une formation de formateurs.